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Chroniques CD part 2


Extra Life


Made Flesh

LoAF Recording/La Baleine

Ce qui frappe en premier chez Extra Life, c'est la voix de Charlie Looker qui donne l'impression de chanter avec son nez. Ca donne un côté cartoons avec des envolées lyriques, comme si Donald Duck chantait de l'Opéra. Mais loin de nous donner envie de rire aux éclats, cette voix unique intrigue et notre curiosité nous intime l'ordre d'écouter jusqu'au bout ce "Made Flesh", aussi atypique que la rencontre de CocoRosie et d'Antony & The Johnsons. En effet le chantier sonore de Extra life mélange musique concrète et noise, post-rock expérimental avec folk rêche et des ambiances qui rappellent les BO de Dany Elfman. Pas étonnant que la musique d'Extra Life soit si complexe, si éclatée, car ce groupe vient de New York, la ville extra urbaine qui a déjà enfanté son lot d'artistes pas comme les autres (Velvet Underground, Glen Branca, Sonic Youth, Swans…). A chaque coin de rue, le meilleur comme le pire peut nous surprendre ! Si vous êtes curieux, réceptif à la musique pas comme les autres, vous ne serez pas déçu par Extra Life. [PL]

 

Failure’s Union

In That Way

Paper & Plastick

Le retour du collège-rock et des années 90 ! Un groupe de Buffalo, dans l’est des Etats-Unis, dont l’inclinaison indie et sa nerveuse réinterprétation devrait rappeler de bons souvenirs à ceux, parmi vous, qui s’enthousiasmaient pour Superchunk, Pavement ou Archers Of Loaf. Et plus encore pour Buffalo Tom, ce galvanisant trio de Boston que Failure’s Union évoque à plus d’un titre. Et pas seulement parce qu’à trois, ils évoluent eux même dans semblable formule. Arrangements précis, des harmonies en rafale et onze titres mélodiquement au dessus de tout soupçon. Une agréable livraison. [AF]

 

Fat & The Crabs

This Is

Autoproduction

Des marrants, dont le bref feuillet promo se lit comme l’extrait d’un vieux San Antonio. Eux-mêmes étant suffisamment anciens (et futés !) pour reprendre les Problèmes et "Dodécaphonie", l’un des titres fer de lance de nos futurs Charlots. Parallèlement, "Mes escarpins" transposition plus que leste de "These Boots are made for walking", est la meilleure version récemment entendue de ce standard garage souvent trop pieusement exécuté. Les Kinks passent aussi à la casserole, ou -devront on dire – à la poêle, "I Need You" devenant là le culinairement incorrect "J’aime les frites". Calorie garantie ! Et les vénérables Standells, non plus, ne sont pas épargnés, "Sometimes good guys don’t wear white" changeant de couleur, rebaptisé "Les Hommes en noir". Du garage truculent, ne se prenant pas une seconde au sérieux mais qui décoiffe assez pour facilement dépasser le stade de la simple plaisanterie. Ah, qu’il est bon de rire un peu en tapant du pied ! [AF] myspace.com/fatandthecrabs

 

Flogging Molly

Live at the Greek theatre 2xCD+DVD

Side One Dummy/Differ-ant

Gare à l’indigestion ! Avec deux CD et un DVD, Flogging Molly ne se moque pas du monde. Les CD, c’est le concert donné en 2009 au Greek theatre de Los Angeles et le DVD, c’est la même chose avec l’image + les clips du groupe + une interview. Le montage de ce concert aurait sans doute pu être meilleur mais on imagine bien les cameramen contaminés par l’énergie débordante de Flogging Molly et on leur pardonne ! On aimerait en dire autant des 5 000 spectateurs que l’on voit parfois danser en plan serré. Mais, en y regardant de plus près, seule une infime partie est devant à s’agiter comme des damnés, les autres sont confortablement assis à regarder Dave King et ses sbires mouiller la chemise. Une performance parce qu’on vous défie de regarder ce DVD sans avoir envie de vous bouger le cul ! Entre mélancolie irish et énergie punk, ce live est un joyau à classer entre les Pogues et Dropkick Murphy’s et confirme toute la classe et la bonne humeur de Flogging Molly ! [JNL]

 

French Cow-Boy

(Isn't my bedroom) a masterpiece

Havalina/Differ-Ant

Ce troisième album du French Cow-boy signe un retour aux sources des mélodies pop qu'on fredonne dès la première écoute et de la mélancolie des premiers pas. Mais il s'affranchit de toute nostalgie en opérant un savant mélange des genres qui ne va pas de soit. "Home" nous ferait presque verser une larme, s'il n'était suivi de si près par "You sexy thing" et son rythme enivrant. "(Isn't my bedroom) a masterpiece" est un bijou de musique hybride qui se moque des frontières entre son américain et guitares anglaises, rythmique disco et textes frustrés, chœurs langoureux et arrangements easy listening, gros son et délicatesse du xylophone, échos envapés et folk plombée. Qu'attendent les fans des Little Rabbits pour reconnaitre French Cow-Boy à sa juste valeur et ramener Federico, Stéphane, Eric et Gaëtan à l'Olympia ? [C]

 

Funki Porcini

On

Ninja Tune/PIAS

James Braddell, mieux connu sous le nom de Funki Porcini, nous offre avec ce cinquième album une musique tout simplement lumineuse. On voyage en mode "cool" et "planant" entre trip hop, jazz, Krautrock et psychédélique dans des univers colorés et oniriques. On ne se lasse pas de réécouter cet album, tant chaque son nous égaie l'esprit d'une beauté sans limite à en donner le tournis., Constellé de surprises sonores pour nous rappeler que l'on n'est pas sur la bande FM style, mais bien en territoire non balisé, Onrestera longtemps dans nos oreilles en éveil, et dans notre top 10 de l'année 2010. [PL]

 

Gush

Everybody's God

cinq7/ Wagram

HIPPIES ARE BACK!! Les Gush se sont fait attendre, quelques amuses gueules, quelques petites tournées, leur premier album arrive enfin en février. Notre rédacteur à clous et a crête disait dans le #102 qu'un album se mesure à l'humeur qui en suit l'écoute. Hum, je suis un peu embêté pour le coup... Oui, globalement c'est un bon album, "Remedy" sonne Lennon, "Dance On" est mon réveil matin, "You Really Got Style" me siffle dans les oreilles à longueur de journée, pour le reste - ou presque - J'ACCUSE (!) un choix de mastering risqué et un mix surprenant. Ma faute aura surement été de me précipiter à chacun de leur concert et de boire ce groove '70 et ces choeurs magnifiques trop souvent, peut-être. J'aime ce psychédélisme épuré du live que j'ai du mal à retrouver sur cet album. Affreuse sensation d'un album attendu qui ce conclu par cette sentence lapidaire "oui, mais...". Reste le live et ici en revanche, comme on dit chez nous, c'est la branlée. [GB]

 

Harlem

Hippies

Matador/Beggars/Naïve

Quelle fraicheur à l'oreille! La musique de ce trio texan sonne diablement bien. Guitare, basse, batterie et toute l'énergie insolente remplie de bonheur juvénile. Ce deuxième album composé de 16 titres aux riffs punk lo-fi est tout de suite accrocheur et il donne la banane jusqu'à l'envie de sortir dans la rue pour partager notre joie. Musicalement on pense au Modern Lovers, Buzzcocks, Television et à des 45 tours pop garages entendus chez des amis DJ qui fouinent tôt le matin dans les vides greniers. Oui ce disque fait du bien à l'oreille, je n'en dirai pas plus: ECOUTEZ! [PL]

 

Heiki

Synesthesia

Watsü Sound

En 6 titres pour 35 minutes, Anthony, Clément, Gaël et Océane, domptent les guitares de my bloody valentine, dépoussièrent les linéaires montagnes russes du Post Rock, réinventent l'expression "le calme avant la tempête", marient avec Brio Mogwai et Boards of Canada. Un premier EP insolent ! [FV]

 

Herzfeld Orchestra

s/t

Herzfeld Rds

Ce disque est un peu spécial puisqu'il réunit tous les artistes du label Herzfeld sur 12 morceaux qui reflètent l'esprit du label home made, dans toute sa diversité musicale : pop ligne claire, americana langoureux, industriel acoustique, électro-pop aigrelette, post punk léthargique, new wave triste… Les textes chantés souvent en chœurs sont à écouter avec gourmandise et distance à la fois : compte-rendu d'un concert cauchemardesque, souvenirs de groupes dépravés, visite aux sans domicile fixe, promesses de l'été non tenues, fermeture d'un supermarché… Ultime clin d'œil, ce "Herzfeld Anthem" étriqué et foireux, mais chanté avec le cœur : (toute le monde cherche un nouveau son, le notre est triste et beau, écoutez notre hymne) Cet album me fait penser à une photo de classe sonore, à la fois touchante et un peu déconnante, comme on l'était à l'adolescence. [C]

 

Hjaltalin

Terminal

Borgin music / Discograph

Lorsque je les découvrais en concert en 2007, les musiciens de Hjaltalin me firent immédiatement forte impression. Pourtant, Sleepdrunk Seasons qui sortait dans la foulée était en deça de mes espérances. Je ne retrouvais pas cette démesure et cette musicalité, qui crèvent les ouïes à l'écoute de Terminal, dernier et splendide album, promu disque de l'année 2009 en Islande. Ambitieux, Terminal l'est au plus haut point. Après, rock ou pas, on s'en tape. Cette oeuvre est un diamant, que je n'attendais plus. Tant de nouveautés tièdes, passe-partout, sans personnalité avaient eu raison de ma patience. Hjaltalin vient nous rappeler que la musique peut encore et toujours se réinventer, à condition d'avoir quelque chose à dire et accessoirement être armé pour le dire. "Suitcase man", "Sweet impressions", "Feels like sugar"... on pourrait toutes les citer, sont des partitions écrites avec amour (de la musique), les arrangements sont dirigés avec soin. Ce collectif de Reykjavik ne prend manifestement pas l'auditeur pour un imbécile, une attitude exemplaire. Terminal évoque souvent cette période bénie, entre fifties et sixties, où les bande-sons des "musicals" étaient signées Bernstein ou Legrand. Enrichi de longues plages orchestrales et audacieuses, l'album ressemble à une espèce de West Side Story moderne, car Hjaltalin n'oublie pas d'y injecter quelques gimmicks actuels. Pour finir, sachez que les voix féminines et masculines duettisent admirablement, sans surenchère. A tel point qu'on a parfois le sentiment d'entendre Scott Walker et Julie London sur un même disque. A se procurer d'urgence, bien entendu. [FD]

 

Holly Miranda

The magician's private library

XL/Beggars/Naïve

La jeune chanteuse américaine est l'un des coups de coeur de Vincent Moon qui l'a filmée dans sa série Fiume nights. Pas très étonnant quand on considère la voix éthérée aux accents très Cat Power, l'espièglerie des chœurs mixtes, les cuivres relégués au fond, le vibraphone au premier plan, les nappes de guitares aériennes et les synthés qui font la sarabande. L'album est produit par David Sitek (TV On The Radio), ceci explique peut être les changements d'ambiances sans crier gare et la richesse des sonorités qui font une grande partie du charme de l'album. On devrait vérifier que la demoiselle n'est pas juste le jouet d'un musicien/producteur surdoué sur scène dès cet été. En attendant, rien ne nous interdit de nous lover dans les méandres de cet album cocon des plus réussi. [C]

 

Hunx And His Punk

Gay Singles


Born Bad/PIAS

Bigre ! Avec Hunx And His Punk il faut être paré pour le second degré. Déjà la pochette annonce la couleur avec une photo centrée sur le slip zébré de Hunx, telle une image disco gay. A l'intérieur, on entre plus dans le détail, avec des poses dénudées de l'intéressé, alors que sa voix sonne… très Ramones ! La musique pop rock est près à s'enflammer dès que l'envie de déclamer "One to thee four" nous prend. Idéale pour la BO d'un film de John Waters, le rock décalé de Hunk et de ses potes d'Oakland, respire la bonne humeur de retrouver ses potes pour une soirée mousse sans limite. A noter que ce cd est une compilation des 45t sortis sur divers labels et que les 6 clips en bonus renforcent l'aspect dérision du bonhomme. [PL]

 

Pamela Hute

Turtles Tales From Overseas

Tôt ou Tard/Warner

Le voici enfin cet album tant attendu par les fans de Pamela Hute. Après moult rebondissements, ce "Turtles Tales From Overseas" parait chez Tôt ou Tard et est distribué par Warner. Une grosse vitrine donc pour un groupe qui le mérite tant le propos est original et crié avec talent. Une fille à la guitare épaulée par un type aux claviers habillé par Tim Bargeot et un autre derrière ses futs tout aussi élégant. Ces trois là sert une pop plutôt raffinée aux accents sixties et seventies. La face A de la galettte est tout bonnement incroyable tant elle se décline en autant de tubes qu'elle peut contenir, une bonne demi douzaine. Le discours se fait plus musclé à l’image de "My Dear" que ne renierait point les skateboarders de la côte ouest. L’album se fini par un safari un peu spatial que l’angélique Pam a voulu rose. J’espère sincèrement que cet album va faire son chemin. Il mérite de se frayer une voie royale et de bouter hors de cette dernière, les ersatz nauséabonds. [Mat]

 

Ich Bin Dead

Angst Rock

Nova Express

Soucieux d’une parité aussi souvent vantée que peu appliquée, Ich Bin Dead a recruté une demoiselle supplémentaire histoire de meubler un peu plus un rock iconoclaste et résolument inclassable. Pour la part masculine du conglomérat, guitare et batterie sont tenus par deux anciens Neurotic Swingers, Pascal Escobar et Matthieu Bimar, ce qui n’est qu’une indication très approximative des eaux dans lesquelles Ich Bin Dead s’ébroue. Parce que le groupe doit beaucoup à la voix de mégère non apprivoisée d’Axelle Schatz tout comme à l’orgue virevoltant de sa complice Julia Stravato. Les deux donnant à l’ensemble une touche indéniablement féminine, sorte de B’ 52 énervés, que ne contredisent pas les charges saturées d’une guitare plus nuancée que fonceuse. Et on a même vu, ça et là, quelques insolents les traiter de Lio trash. Décidément, le respect se perd ! Du proto- garage convulsif qui ne roule pas à l’ordinaire. [AF]

 

Inner Terrestrials

Live

Mass Prod

Ce disque est un peu un résumé des épisodes précédents : un live de 1997, un EP de 1999, un autre de 2003 et un titre pas daté. Rassurez-vous, tout ça reste d’une grande cohérence car depuis le temps que le trio anar trace la route, il a prouvé qu’il savait garder le cap, entre punk et ska punk, avec une once de reggae et une pointe celtique. Ce live un disque âpre, rageur, rude et souvent dansant. On aurait aimé entendre davantage le public (il y a quand même dix titres live) pour être mieux dans l’ambiance mais on applaudit très fort les versions studio de "1066" et "The cause" et surtout la reprise très personnelle et irrésistible de "Guns of Brixton" qui clôt l’album. [JNL]

 

James Chance & Terminal City

The Fix Is In

Le Son Du Maquis

Depuis l’époque lointaine et fondatrice de Teenage Jesus & The Jerks, James Chance a multiplié projets, visages divers et belles périodes de silence. Quelqu’un que nous avouons bien volontiers n’avoir suivi que de loin en loin et qui revient aujourd’hui accompagné de Terminal City pour un album condensant avec une élégance toute tricolore – noir, blanc, rouge – les obsessions du saxo blanc-bec pour certaines formes de musiques noires américaines. Jazz, en premier lieu, la vraie pulsation du disque, mais aussi funk ou rhythm and blues, autant de fixettes que Chance revisite de sa voix fragile de crooner décalé en perpétuel équilibre sur une corde effilochée. Un acrobate que se rie du vide. Saluant Chet Baker ("Blonde Ice") ou Maceo Parker ("The Fix Is In"), mais aussi Charlie Mingus ("Another Pompadour") ou le grand Duke Ellington. Une façon de rouvrir le grand livre des années d’or en s’y autorisant quelques ratures distinguées. D’ailleurs, pour tout dire, un album contenant autant de xylophone, instrument paradisiaque s’il en est, ne peut qu’arpenter le bon côté du boulevard ! [AF]

 

Jonjo Feather

Is or OK

Numb Tongue/Cargo Rds

 L'Angleterre n'a pas fini de nous étonner avec ses agités du bulbe géniaux, cachés au fin fond de leur garage, estropiant leur héritage pop avec des idées de noise grinçante, de guitares froissées, de chant libidineux ou de textes complètement déjantés. Petit frère de Baby Bird, en moins neurasthénique, aussi déconnant que Mujison, Jonjo s'est doté d'une ribambelle de pédales d'effets pour sonner comme Jesus and the Mary Chain mais a oublié de lire le mode d'emploi. D'où un album qui zigzague entre mélodies accrocheuses et dérapages désespérants, chœurs lumineux et chant caverneux. Une curiosité à observer de près. [C]

 

JUL

Until the end

Clementine Records

 On est jamais mieux servi que par soi-même. Until the end est le premier album autoproduit de Julien Erades, un petit gars de Melun, qui a passé le plus clair de son enfance à écouter les vinyles de ses parents, où l'écurie Motown avait une place de choix, pour ensuite s'en affranchir et trouver sa voie via les réseaux habituels : les disques qu'on se prête entre potes, les ondes radiophoniques, etc. D'abord batteur, puis bassiste, enfin guitariste, JUL va néanmoins s'entourer d'un vrai groupe, pour affiner sa perception de la musique et la reproduire sur scène. Until the end est essentiellement composé de folk songs, groovy à mort, où la guitare électro-acoustique est mise en avant, appuyée par un piano Fender, qui renvoie aux années soixante-dix, et ce rock caractéristique de la côte ouest, remis au goût du jour par les délicieux Minor Majority ou Phoenix, par exemple. On pense parfois à Ben Harper, Jeff Buckley, G Love & Special Sauce ou Charlie Winston. Les chansons sont justes, spontanées, la voix de JUL impressionne. Quelques titres accrochent d'emblée (Rescue me, Old tree ou Call me at 4:04), d'autres sont plus conventionnels (I'm down). Toujours est-il que cette collection de chansons d'une rare sincérité, augurent d'un avenir pour le moins radieux. [FD]

 

Jumbo Layer

Marie Laveau’s Not Dead

Rock Paradise Records

 Chroniquer le disque d’un one man band alors que la question de l’homme orchestre est loin de m’être étrangère n’est pas chose facile. Nous sommes une grande famille ! Tout le monde se connaît plus ou moins … Ce "Marie Laveau’s Not Dead" de Jumbo Layer est atypique puisqu’en lieu et place du garage que nous servent d’habitude les hommes en solo, nous avons droit ici à un jambalaya vaudou des plus goûteux. Quelque chose entre Dr John et le swamp de TJ White. Les couches, d’où le nom du bonhomme, s’empilent à merveille et la sauce a pris depuis longtemps quand arrive la très dansante piste 8 "Don't run". Quelques instrumentaux direct from the bayou nous réchauffent l’échine (du diable bien sûr !).Tout ceci est extrêmement bien réalisé. Nous aimerions maintenant avoir plus d’infos sur ce Jumbo Layer qui a notamment travailler avec James Brown en son temps et cette Marie qui pose lascivement sur la pochette ! Goddamn ! [Mat]

 

Kaki King

Junior

Cooking Vynil/PIAS

Kaki King est une guitariste reconnue dans le monde entier, mais reste insaisissable. Quelle relation entre la BO de "Into the Wild" et le dernier EP des Montains Goats ? Kaki King ! Quel lien entre le poppy "Spit it back in my mouth", l'écorché "The hoopers of Hudspeth" et l'envoutant "Hallucinations from my poisonous German streets" ? Kaki King ! La jeune femme se fiche bien du qu'en dira-t-on et s'offre un album sans aucune homogénéité, aussi bien dans la composition (pop, folk, rock, instrumentaux) que dans la production (acoustique rêche, parasites électroniques, grosse rythmique, piano à queue...). Seule la voix juvénile (très proche de celle de Laura Veirs) fait le lien entre des mondes qui se télescopent sans jamais se fondre. A écouter avec attention, surtout à partir du 4ème morceau. [C]

 

The Kissaway Trail

Sleep Mountain

Bella Union / Cooperative music

 Sleep Mountain démarre en fanfare avec le sensationnel SDP. Carillon et session rythmique au carré font la paire, appuyée par une guitare tranchante et une voix extatique. Puis ce sont Friendly fire et sa batterie en contre-temps (en hommage aux compatriotes Mew ?), New Year qui prend son temps avant de dévoiler tout son éclat, ou la reprise surprenante de Philadelphia de Neil Young. Tout au long de l'album, se succèdent chorale, riffs d'accordéon, piano déglingué, un souffle, une impulsion qui rendent la musique de ces Danois épique. Alors bien sûr, on pense à Arcade Fire, Sigur Rós ou au Deserter's songs de Mercury Rev, mais aussi à leur premier essai, déjà incandescent, sorti en France en 2007. The Kissaway Trail a le mérite de proposer quelques chansons solides et une partition qui ne doit rien à personne. Les influences sont digérées et le groupe travaille son oeuvre, comme tout bon artisan, avec beaucoup d'honnêteté. Pour preuve, ce geste qui en dit long, parce qu'ils le trouvaient quelconque, ce qui devait être le second album a fini dans la corbeille, et les petits gars d'Odense se sont remis au travail pour accoucher de Sleep Mountain. Bien leur en a pris ! [FD]

 

Kong

Snake Magnet


Brew records/Discograph

 Aie, ici explosif sonore! La musique noise et électrique de Kong couine, grince et hurle à travers nos tympans. On pense à un groupe de Chicago (Big Black ,Shellac) et on découvre que Kong vient de Manchester. Bien loin des clichés de la cold de Joy Division, des acides d'Happy Mondays ou de la pop d'Oasis, le trio réalise une musique hardcore noise totalement hystérique. Les compos sans fioriture ne laissent pas le temps de respirer, elles sont toujours en ébullition, prêtes à brûler les neurones. Inutile d'en dire plus, vous l'avez compris, avec ce premier album (sorti l'année dernière en import et disponible aujourd'hui sur notre sol humide), Kong n'est pas là pour se la raconter, il le fait et basta! [PL]

 

The Lanskies

Bank Holiday

Indelible Records/Discograph

 On connaissait un Lansky : notre Johnny Hallyday dans une de ses inoubliables prestations télé. On ignorait qu’il avait cinq garnements et les avait confiés à deux mères nourricières, le rock et la pop. The Lanskies donc, batards déviants (ouf !) de notre idole des jeunes, sales gosses nourris à la power pop british et au rock indé new-yorkais, avec des pointes de groove imparable, et des influences très recommandables. En vrac, The Strokes, The Rakes, Radio 4 et Robert Smith pour la voix. Rien que du bon dont ils ont su extraire un nectar tel que "Bank holiday", imparable machine qui pourrait faire bouger plus d’un popotin sur les dancefloors mancuniens. [JNL]

 

Leo (88man)

From speaking parts to blazing rows

Kythibong Rds

 Impossible de ne pas penser à la figure tutélaire qui a lancé le jeune Leo sur les routes il y a quelques années, The Nightcrawler aka Red. Et à travers lui, Kurt Wagner dont le phrasé si particulier, cool et détaché, sert de modèle à la première face de cet album. Une face toute douce, où l'acoustique résonne des chœurs éthérés ou espiègles et les cordes ont autant d'importance que la guitare, le piano, les cuivres et le vibraphone. Un petit tour de 78 tours et on est projeté dans un monde un peu décalé du focus américain, avec une pincée de jazz, un rythme de valse, une sonorité vaguement espagnole ou tout simplement rétro. Allez savoir, avec un tel rythme, on n'a plus vraiment envie de réfléchir, plutôt se laisser aller à la sieste, à la douce rêverie d'une après-midi d'été. Léo branche les guitares, mais même les riffs furieux qui se déchainent ici et là n'arrivent pas à secouer cette langueur douce et heureuse qui a pris possession de notre corps qui dodeline doucement au gré de rythmes de plus en plus rapides et de chœurs de plus en plus forts. Trop tard, la magie a dépassé le magicien et quand Chiara Locardi (bien loin de l'univers énervé de l'Enfance Rouge) entre en scène, on est déjà loin ! [C]

 

James Levy

Promising Young Talent

Township

 Derrière la pochette énigmatique de l'album se cache un certain James Levy. Cet artiste new-yorkais a conçu tout seul (écriture, production) les 13 titres de son album. Sa musique flirte avec la folk et l'électro, et sa voix fait penser à celle de Leonard Cohen ou Ian Mc Culloch. L'ambiance générale est mélancolique, mais fort heureusement ne nous fait pas sombrer dans le désespoir. Limite intimiste, on a l'impression d'entrer dans l'appartement du chanteur, d'être à côté de lui. Le rendu sonore est très harmonieux (Les Bads Seeds et Nick Cave ne sont pas loin) et chargé d'émotion. Sa voix transmet beaucoup de vibrations, parfois inquiétantes. Cela donne envie d'apprendre l'anglais pour comprendre ce que raconte James Levy, surtout sur le titre "Happy Birthday David Bowie" qui clôture l'album avec des cuivres d'une façon nonchalante qui donne envie de taper des mains. Au final "Promising Young Talent" porte bien son nom : un disque OVNI, à la fois surprenant et accessible, exigeant mais pas trop, recommandé aux oreilles grandes ouvertes. [PL]

 

Liturgy

Renihilation

20 Buck Spin

 Le black, c'est encore un genre qui à mis longtemps à sortir de l'intrépide moquerie dans laquelle je l'avais placardé pour atteindre un degré suffisant d'envie de découverte pour se laisser porter à mes oreilles. Et tant qu'à faire, autant commencer par un disque de black metal qui n'est pas du black metal. Un disque de black metal qui est du screamo. Épique à en mourir, punk jusqu'au coin des ongles et pourtant proportionnellement intello. Imagerie sobre mais étudiée, pure transcendental black metalnuageux, voilà ou est le coté intello, marqué sur la gueule des musiciens, bien loin des full arm de pics et de la Finlande, mais au contraire en plein milieu arty New Yorkais, avec leurs potes de Krallice, aussi imbuvables que feu tendance. Épique à mort donc, j'en étais là, avec ces notes de guitares suraiguës façon post rock réacteur 6000, quelques riffs à peine réellement discernables tout du long, mais une puissance punk incroyable, grâce à ce batteur qui fracasse ses cymbales de A à Z en blast quasi constant et le son poussiéreux, pas si défini, mais incroyablement tapageur et rentre dedans. Le disque ne laisse pas franchement le choix, même pas celui de rentrer dedans, c'est lui qui s'en charge, à pleine vitesse, les phares stroboscopiques sur "on". Et pourtant, le disque s'aère, grâce aux interludes ambiants discrets ou plus tordus expérimentaux d'une part et simplement car les sept autres morceaux dans leur plus grande fureur épique, sont lumineux, désespérés plus qu'haineux. Ceci, comme le gros coté screamo, grâce à la voix - inintelligible et terrée au fond du mix - arrachée, criée et délayée sous les guitares, participe grandement à tous les cotés du disque : épique, puissant, et quelque part, beau. Au contraire, on le remarquera sans peine, de l'artwork immonde. [LM]

 

Little Green Fairy

Stuck Out Of Time

Nova Express

 Mis au repos force suite à la grave blessure de l’un des deux guitaristes, Little Green Fairy refait aujourd’hui surface, et après de longs, longs mois d’absence, nous revient meilleur que jamais. Ancien chanteur de Tabasko et voix de Sonic Assassin, impressionnant combo Franco- Italien, Rauky est la véritable épine dorsale de ce trio envoutant, où son jeu de guitare unique et son chant si particulier interdisent toute encombrante ressemblance. Mais Clarisse, batteuse épidermique au jeu brutal, a aussi droit à sa part de justes louanges. Tout comme Eric Dim, guitariste agité de plus conventionnelles manières, mais à la redoutable efficacité. Alors, Little Green Fairy, c’est un peu comme une collision entre les Stooges et les Saints. Avec les Screaming Trees pour témoins. Et constant rédigé au dos d’un exemplaire d’un Pebbles millésimé. Ajoutez Lucas Trouble et Nova Express pour le contrat d’assurance. Et vous voila parés ! S’écoutera suffisamment fort ! [AF]

 

Little Red Lauter

Slow Down

Herzfeld Rds

Après une introduction inquiétante et triste comme un bonnet de nuit (j'ai un cerveau pourri dans ma salle à manger/ça sent l'abattoir), le duo Little Red et Lauter se dévoile en amateur de pop, espiègle et électronique, acoustique et délicat. Surprise de l'alternance entre chœurs mixtes folk et boite à rythme, rock'n'roll acoustique et industriel lo-fi. Quand on n'a pas les moyens de ses désirs, reste l'imagination et celle de Little Red et Lauter carbure au super, sans plomb ! [C]

 

Lonelady


Nerve Up

Warp/Discograph

 Lonelady est le projet solo de la mancunienne Julie Campbell et ressemble au vilain petit canard dans le paysage du label électro Warp. En effet la musique de Lonelady est proche du format chanson (avec parfois des tics à la Killy Minogue), mais avec une rythmique post punk façon A Certain Ratio et un style assez 80's, sans tomber dans le revival. La pochette en noir et blanc et connotée Factory Records, ce qui lui va comme un gant. [PL]

 

Lost Sphere Project

Verse XXIV

Division Records

 Je ne vais faire l'affront à personne de ressortir la métaphore plus éculée tu meurs de l'horloge Suisse, on l'a déjà trop lue à propos de Mumakil. La référence tombe dès la deuxième ligne comme elle saute au oreilles dès le premier morceau du disque, on est en plein technico-core grind, gentiment barré et ultra propret. Trop appliqué, peu de choses qui dépassent, une violence calculée, chaotique et extrêmement bien branlée pour sur, mais pas assez grouillante, encore moins vivante. On pense donc directement aux éléphantesques suisses mentionnés plus haut pour la puissance massive mais calibrée, moins frontalement brutale ici néanmoins, au feeling plus plus chaos-core 2000, sans le son qui ferait basculer le tout dans la folie pure comme chez Clinging To The Trees Of A Forest Fire à qui Lost Spere Project m'a aussi fait penser, mais au poil tellement plus lisse et ras. Verse XXIV est sur-efficace, produit au poil de la technologie - on sent qu'ils ont mis le paquet à ce niveau là - mais toute cette force de frappe manque pour moi grandement de vie, d'un supplément de véritable haine qui se mette au service de la débauche de technique. A voir en concert assurément, pour compenser. [LM]

 

Maintenant

Gigi

Tomlab/Differ-Ant

Fans des Ronettes et des Shangri-Las, amoureux du son plein des productions de Phi Spector, voici un disque pour vous. Gigi est le projet d'un songwriter (Nick Krgovich) et d'un producteur (Colin Stewart) qui ont enfermé une belle brochette de jeunes chanteurs et chanteuses, seuls ou en chœurs, dans un studio muni d'une chambre de réverb vintage. Le résultat est idéal pour accompagner les soirées d'été et laisser le bon temps rouler, comme ils disent là-bas. [C]

 

Tom McRae

Alphabet of Hurricanes

Cooking Vynil/PIAS

Après avoir été l'une des révélations de l'internationale pop/rock britannique, avoir été choisi pour moult génériques de publicités aux fondus enchainés sophistiqués, avoir fait fantasmer des milliers de jeunes filles, Tom Mc Rae est parti vivre sa vie sur la route de tournées incessantes autour du vaste monde. De ces deux ans d'absence à notre paysage et à lui-même, il en a tiré cet album intime et sincère, sorti cet hiver dans une confidentialité toute française. Pourtant les instruments chinés sur Ebay, et entassés dans le studio maison donnent un son rêche et fier à des chansons qui se battent sur le fil du rasoir folk et rock. Bel exercice d'abnégation et de maturité pour le beau blond aux yeux bleus, qui devrait lui acquérir des fans moins nombreux, mais certainement plus fidèles. [C]

 

Mardi Gras BB

Von Humboldt Picnic

Hazelwood/Differ-Ant

 Ce nouvel album du Mardi Gras BB nous invite à faire le voyage autour de la Terre en douze morceaux, à travers les yeux d'un Alexander von Humboldt moderne (l'original étant un explorateur du début du XIXème siècle, membre de l’Académie des sciences française et président de la Société de géographie de Paris). Pour une fois, la pochette est au diapason de la musique. Chaque membre du groupe portraitisé dans un médaillon aurait pu orner l'édition originale du livre de Jules Vernes, qui a en partie inspiré le disque. Le jazz est tout puissant et les cuivres sont les rois, les styles musicaux orientaux et occidentaux se succèdent au grès de l'inspiration de Doc Wenz qui nous surprend même à pousser la chansonnette en français et en allemand, sa langue natale. Mais à écouter de plus près les textes, il semble que le Mardi Gras BB ne soit pas là que pour rigoler : fille perdue faisant le tapin sur le Boulevard de Clichy, moine tibétain devant se battre contre les forces de l'ordre chinoises, épicier tué dans un attentat de l'ETA, passeurs de drogues et clandestins mexicains… L'opposition entre la musique apparemment anodine et la noirceur des textes n'a jamais été aussi flagrante, battant Calexico sur son propre terrain. A (re)découvrir absolument ! [C] (www.hazelwood.de)

 

The Marigold

Tajga

Acid Cobra

 "Tajga" est le deuxième album de ce groupe italien en activité depuis une dizaine d'années et dont la musique nous entraine dans les abimes d'une messe funéraire au son coldwave. On pense à Cure époque "Seventeen Seconds"/"Faith", parfois mélangé à des guitares Shoegaze. Sombre à souhait, mais parsemé d'éclaircies, les neuf titres de cet album jalonnent un voyage à la fois inquiétant et lumineux. Certes, écouter ce son en 2010, (et non plus en 1981), peut faire un drôle d'effet, mais pas du tout désagréable. Les codes des voix "maniérées" sont respectés (style "j'ai mal, ma tête me fait souffrir"), la basse est bien en avant et la batterie discrète (pas très Cure ça!). Les guitares trainent à souhait, les claviers glissent vers les cieux et des petites notes de piano tombent ici et là comme des flocons de neige. Donc si vous êtes prêts à (re)sortir votre gabardine, vos docs et à vous coiffer en pétard pour affronter ce monde "sans pitié" qui nous entoure, n'oubliez pas d'inclure "Tajga" dans votre I-Pod. A noter qu'Amaury Cambuzat (Ulan Bator et boss d'Acid Cobra) joue en guest quelques notes sombres et délicates.[PL]